Obernai - « Le mobilier sonore », label obernois
Musique : l'âge de l'indépendance Sambox, vous connaissez ? Sans doute que non. Pourtant cet artiste est produit à Obernai, par un label indépendant, « le Mobilier Sonore ». Deux jeunes Obernois, Stéphane Coulon et Olivier Bellorini l'ont créé parce que ras-le-bol du diktat des grosses sociétés de production de disques. Un phénomène qui n'est pas qu'obernois. « Un de plus qui va nous saper notre fond de commerce » doivent râler les grands pontes de l'une ou de l'autre majors du disques... Un de plus ? Avec la révolution numérique et internet, les labels de musique indépendants sont chaque année de plus en plus nombreux à produire des artistes sortis des oubliettes des grosses sociétés de production et à conter fleurette à des consommateurs de musique aux habitudes nouvelles.
Même Alain Souchon s'est fait virer comme un malpropre par sa société de production. Parce qu'il ne vendait plus assez de disques. La faute à internet, au MP3 et aux méchants pirates... Les grosses sociétés, comme Universal, Sony BMG ou encore Warner se refusent de plus en plus à produire des artistes dont ils ne sont pas sûrs qu'ils feront un carton illico.
Employé le jour Et quand les majors ne sont pas là, les labels indépendants dansent... Stéphane Coulon et Olivier Bellorini font aussi partie du bal. Ces deux O! bernois de 28 et 27 ans, employés le jour, se transforment la nuit en musiciens, en compositeurs de musiques électroniques depuis leur home-studio. Ils ont poussé la transformation jusqu'à créer leur propre label indépendant.
L'aventure débute le premier mars 2003, avec la création d'un site internet baptisé
www.lemobiliersonore.com. Pour valoriser le house, le trip-hop, les musiques électroniques dans leur grande diversité. Ensuite, forts du soutien de plusieurs radios indépendantes, ils créent une micro-entreprise à statut associatif, un label indépendant, qu'ils gèrent le soir, en rentrant du boulot.
Made in chez soi « On était fatigués de voir les labels habituels fermés aux nouvelles propositions, aux démos que les musiciens leurs envoyaient. Finalement, on a décidé de créer le nôtre », raconte Stéphane. Avec un objectif : l'envie de faire découvrir une musique plus riche en émotion, plus sincère et plus origina! le. Parce que provenant de groupes sortis de nulle part « auxquels les majors n'auraient jamais accordé leur confiance ».
Une fois l'entreprise créée, il faut trouver un artiste à produire. Le premier sera Sambox, un musicien du centre de la France, représentatif de cette nouvelle génération d'artistes qui font de la musique made in chez soi avec une batterie d'équipements informatiques ou électroniques compatibles avec l'appartement ou la maison.
L'effet MP3 Cet artiste que l'on dit incontournable dans le monde de la MAO ou musique assistée par ordinateur, attendait de pouvoir être produit... C'est chose faite en mars 2004, où le mobilier sonore édite son album à 500 exemplaires vinyle et 110 CD. Bingo : plus de 40 radios françaises indépendantes l'ont plébiscité (dont Azur-fm en Alsace).
Comment Stéphane et Olivier en sont arrivés là ? « Avec un simple ordinateur et internet, on a réussi à se constituer une mailing-list de plus de 2! 000 contacts : radios, distributeurs, médias etc. Il faut également être suffisamment crédible pour voir la FNAC distribuer vos disques. » Enfin il y a les soirées qu'ils organisent pour valoriser leur label, faire jouer et connaître les artistes. Et puis il y a le MP3, un bon moyen pour faire de la publicité. Quant à la production à proprement parler du CD, elle est confiée à des professionnels du son, pour une question évidente de qualité.
Tout faire soi-même « L'avenir du label est là : produire des disques en petites quantités, les vendre nous-mêmes, organiser des soirées pour les vendre, bref tout faire soi-même ou presque ». Parce que la musique électronique qu'ils produisent s'écoute dans des cercles restreints (pour l'instant) de connaisseurs et d'amateurs, les deux producteurs ont conscience qu'il sera difficile de ne vivre que de la vente de CD, surtout dans un contexte où ils sont de moins en moins achetés alors que, paradoxalement! , la musique compte de plus en plus de fidèles : « la vente des CD ne sera bientôt plus qu'accessoire. Il ne restera plus que le live pour vivre de la musique. »
D'où l'idée d'en rester à une production modeste, mais brillante par sa qualité et son originalité, et de faire l'apologie de nouveaux musiciens. Le label compte d'ailleurs produire prochainement une compilation de musiques électroniques.
Installé à Obernai, une ville qui n'était a priori pas destinée à accueillir des labels de musique, le mobilier sonore est le reflet de l'évolution des musiques actuelles : de plus en plus produites à échelle domestique, par des amateurs de plus en plus professionnels, à destination de petits cercles de consommateurs, de « tribus » en quête de lieux où écouter leur musique et de labels auxquels ils peuvent facilement s'apparenter.
J.-F. Ott
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Dernières Nouvelles d'Alsace - 24.7.2005